La perception de notre propre dignité implique toujours le regard et la présence des autres, ainsi que notre capacité à contribuer à un groupe, que ce soit la famille, une association ou la communauté politique.. Aucun individu n’est pleinement indépendant. Il existe des formes localisées de cette participation : si vous regardez, avec un fort affect d’admiration, un tableau magnifique, vous êtes subjectivement dans l’empire du vrai. Ou si, après un rude labeur, vous comprenez enfin la logique et la portée de la subtile démonstration d’un théorème. Au sens antique, est « philosophe » la personne qui « cherche la vérité et cultive la sagesse », comme Socrate et Platon, Épicure et Lucrèce, Épictète et Sénèque. Cette remise en cause de l’aristocratisme intellectuel souvent perçu chez Platon est l’une des raisons qui vous poussent, dans votre réécriture de La République, et peut-être contre sa lettre, à faire de Platon un précurseur de l’idée de communisme ? Pour en comprendre la genèse, à un niveau formel, il faut partir de ce que j’appelle une « situation », soit un grand ensemble historiquement déterminé, comme la Grèce antique, l’Angleterre du XVIIe siècle, la Chine du XXe siècle, etc. Si, en dépit des efforts des vrais philosophes, elle s’en avère incapable, l’humanité n’aura eu, comme le disait à peu près Sartre, dans l’histoire de la Vie sur notre étroite planète, « guère plus d’importance que les fourmis ». La notion de société pose ensuite un problème sociologique : dans quelle mesure nos conduites individuelles sont-elles socialement déterminées ? La-Philosophie.com aide les élèves de terminales dans la préparation du bac, les élèves de classes prépa dans celle de leur concours, ceux de fac dans leurs recherches, et enfin tous les curieux de sciences humaines à étancher leur soif de savoir. La reconstruction du lien entre singularité et universalité, la réhabilitation de l’idée de vérité, la visée de la vraie vie comme expérience des multiplicités génériques, l’égalitarisme intellectuel, politique, existentiel, le fait que les mathématiques, les créations artistiques, les rencontres amoureuses et les engagements politiques constituent toute la vraie saveur d’exister, la valorisation du bonheur contre la notion marchande de satisfaction, aujourd’hui partout dominante (le client qui a payé est-il « satisfait » de la marchandise ? La vie est compliquée et beaucoup de questions nous viennent en tête. Cet entretien est extrait du hors-série n°45 de Philosophie magazine dédié à Platon, intitulé Comment sortir de la caverne ? Bien sûr, dans le contexte du temps, les gardiens, ce n’était pas tout le monde, loin de là. Les premiers pas sont souvent rébarbatifs, qui en découragèrent plus d’un (…). de mourir en faisant son travail que de vivre dans le déshonneur : « Quelle que soit la place dans le rang qu’on occupe, le devoir impose, à mon avis, d’y demeurer quel que soit le risque encouru, sans mettre dans la balance ni la mort ni rien d’autre, en faisant tout passer avant le déshonneur.» Il finit de défendre sa thèse en expliquant que tout le monde craint la mort sans même savoir ce qu’elle est et ce qu’elle apporte : « Car personne ne sait ce qu’est la mort, ni même si elle ne se trouve pas…. Vivre en philosophant n'est pas suivre le chemin où la majorité se dirrige et ne pas suivre ceux qui croit savoir ce dont ils ne savent pas. » ou « Pourquoi une chose est belle ? Est-ce une manière de retrouver l’intuition de Platon : la philosophie ne peut pas être une science théorique et académique parmi d’autres, elle doit transformer l’existence en profondeur ? La question, pour nous qui vivons en Occident, n’est donc pas si l’on peut vivre sans État, mais si l’on veut vivre sans État – ce que très peu de gens envisagent. Mais quelle est la définition de sens? Ce que Socrate déclare à la fin de son procès pour expliquer à ses amis qu’il préfère boire la ciguë plutôt que de s’enfuir pour échapper à sa condamnation à mort ! Contre le relativisme ambiant et les nouveaux sophistes, Platon est, plus que jamais, le philosophe qu’il nous faut : c’est la conviction d’Alain Badiou, l’un des rares penseurs contemporains à oser parler d’universalité. » est l’intitulé que j’ai retenu pour le Séminaire decette année. La quête de la vérité est le but même de la philosophie. méthodologie de l'explication de texte en philosophie. Votre théorie des vérités-événements n’est-elle pas, en ce sens, anti-platonicienne ? © Vincent Muller/Opale/Leemage. Filf, S.Eleaume-Lachaud. Disons-le ainsi : une vérité est une multiplicité générique, alors qu’un homme, une femme, ce que j’appelle un individu, ou un animal humain, est une multiplicité ordinaire. Mais le retour à la réalité, souvent vécu comme un cruel désenchantement, interroge la quête même du bonheur : n’est-elle pas irresponsable, égoïste, immorale ? Il faut partir du fait qu’une vérité est toujours le résultat d’une création dans une situation déterminée. Certaines nuances sont pourtant à établir : vivre, ce n'est pas seulement exister. Ce « maître à penser » sulfureux veut réactiver le geste original de Platon, qui fonde les vérités sur les mathématiques, la politique, l’amour et la poétique. Ne pas abandonner ses principes ou son rôle par peur de quoi que ce soit, il ne faut être lâche. Mais il existe des formes encore plus étendues, plus actives, de cette vraie vie, celles qui concernent la participation post-événementielle à une vérité en train de se faire dans une situation, participation qui vous contraint à un engagement durable, à des inventions répétées, à la production d’une multiplicité générique, qu’il s’agisse d’un militantisme politique, de l’écriture d’un roman, de la résolution d’une crise dans un grand amour, ou de la découverte d’un nouveau dispositif expérimental en biologie…, “Seule une vie placée sous le signe des idées vaut la peine d’être vécue pour Platon. Dans l’Antiquité, la philosophie était d’abord un mode de vie et non une simple construction théorique. 8 À propos des « choix » ou des « options existentielles », voir Hadot, Qu’est-ce que la philosophi ; 8 Je n’ai jusqu’à présent donné qu’une esquisse de l’idée que Socrate se faisait de la philosophie comme manière de vivre. Pour lutter contre le relativisme ambiant, également ? Il scandalise ses jeunes auditeurs en énonçant qu’une femme peut parfaitement être un(e) gardien(ne), donc un(e) dirigeant(e) de la cité idéale. Ensemble des éléments qui donnent de la valeur à l’existence humaine. Qu’est-ce que la philosophie ? Ce statut du mourir trace la frontière entre le vivre et l'exister. L’homme est un organisme qui contribut à la vie sur Terre et se siturait au sommet de la pyramide de la création. Quand Nietzsche n’est encore qu’un enfant, son père tombe sur la tête et meurt subitem… PHILOSOPHIE: Qu'est-ce que signifie vivre en société? Des modes d'emploi pour appliquer concrètement les leçons des grands philosophes dans nos vies quotidiennes. D’après le définition de la philosophie, c’est une science qui étudie les principes et les causes, à un niveau abstrait et général. Ce concept, présent dès l’antiquité grecque par la philosophie d’Epicure, renie les inquiétudes de l’avenir, et le regret du passé, et se concentre sur la pleine conscience ainsi que l’acceptation de ce qui nous est donné, à notre vie humaine en tant que sujet. la femme étendue près de vous. Il est donc abusif de parler de sociétés animales qui ne se perpétuent que par hérédité – non par héritage –, mais pertinent de parler de société industrielle. Parce que, dans sa cité idéale, les dirigeants (il n’y a pas de « roi philosophe » dans La République, il n’y a qu’une collectivité de gardiens) devaient ne rien posséder, tout partager, et confondre leur bonheur avec celui de la cité. Ce qui n'est pas une moindre connaissance qu'une autre car, comme l'écrit Descartes, si l'on découvre que «la connaissance cherchée dépasse entièrement la portée de l'esprit humain, [on] ne s'en jugera pas pour autant plus ignorant, puisque ce n'est pas une moindre science de savoir cela que de savoir quoi que ce … Le brigand contraint par la force et la puissance qu’est le pistolet à donner sa bourse, mais jamais personne ne l’acceptera de plein gré si il est contraint. Mais « création » implique que quelque chose a été produit qui n’était pas prévisible dans les strictes lois du multiple où ce quelque chose est créé. Vivre ou exister, c'est émerger du néant, c'est avoir une réalité dans le monde. Ces préjugés sont du reste encore très présents : qui pense que la philosophie devrait être un enseignement fondamental et universel dès la maternelle ? Elle privilégie donc la déduction mais ne s’y réduit pas car elle part d’une première vérité (prémisse) saisie par intuition (pas déduite donc) : il peut s’agir d’une évidence ou d’un axiome. Brad Pitt dans le rôle de Platon, Meryl Streep dans celui de son épouse et Sean Connery en Socrate? Il résulte de tout cela que la théorie mathématique des ensembles est la formalisation adéquate de toute ontologique du multiple pur, ce que je nomme le « multiple sans Un ». Il s’agit des Yama, que nous pouvons traduire par commandements moraux universels. Nous pouvons philosopher, c’est une activité possible pour nous, mais nous ne pouvons pas dire, à nous…. Elle prend ce nom en Grèce au iv e siècle avant notre ère à la suite de différentes impulsions qui vont former ce qu'elle deviendra. Certains en font leur métier : on les appelle les philosophes. “S’il n’existe nulle vérité universelle, ce n’est pas la peine de parler de philosophie, le mot ‘idéologie’ suffit”. Philosophie. » ou « Qu'est-ce que le bonheur ? L’universalité est une création au sein d’un tel multiple. Auteur d’une traduction très modernisée de la “République” de Platon, Alain Badiou nous explique ici comment et pourquoi il s’est éloigné de l’existentialisme de Sartre pour lui préférer le platonisme. Il ne faut avoir peur de la mort, sinon c'est cela qui va nous dirriger au lieu de nos principes. Les 5 yamas : ahimsâ : non-violence en action, en parole et aussi en pensée. Comment concilier l’universalité des vérités avec la diversité de leurs expressions ? Paru en version papier à l’été 2020, vous pouvez vous procurer ici ce numéro spécial, ainsi qu’en feuilleter un extrait gratuit. Est-ce tout simplement survivre ou vivre une … La vérité est donc universelle, mais elle « s’incarne » de diverses manières, au cours de l’histoire ? Le Vrai constitue pour Platon, avec le Beau et le Bien, une valeur absolue. Cette leçon intègre l'étude de textes courts utilisables en classe. Et quant à Platon, il exigeait de celui qui prétend diriger la Cité qu’il fasse d’abord dix ans d’études mathématiques, y compris très difficiles ! Alain Badiou en 2016. Vous avez intitulé un volume de votre séminaire Pour aujourd’hui : Platon. C’est du reste la raison pour laquelle tout platonicien doit entreprendre une critique philosophique de la démocratie électorale, telle qu’elle existait à Athènes, et telle qu’elle existe chez nous. Les essais des logiciens du XXe siècle pour éliminer toute intuition des démonstrations ont échoué : Depuis Gödel, mathématicien autrichien, auteur d’un fameux théorème (dit « d’incomplétude »), on admet que toute axiomatique contient une part d’indémontrable. On peut en effet se satisfaire d’illusions et c’est pourquoi l’imagination est la faculté du bonheur. Et si on rencontre un point d’arrêt à cette descente, ce n’est pas quelque chose comme l’Un, c’est tout simplement la multiplicité zéro, l’ensemble vide, noté ∅. Un des gestes constitutifs du platonisme est précisément de penser ce que c’est qu’une idéologie, en tant qu’elle organise les opinions dominantes dans la cité. La question qui nous est posée semble avoir une première réponse positive à partir des faits eux-mêmes. C’est exact. Socrate a été déclaré coupable de « corruption de la jeunesse par un tribunal populaire. Est-il nécessaire de philosopher pour vivre ? Mais souvent la vérité est cachée. En ce sens spontané et très simpliste, la philosophie aiderait donc à mieux vivre. J’ai repris, pour nommer cette caractéristique essentielle, le lexique de Cohen, inventeur en mathématique de ce qui m’a permis de penser philosophiquement l’événement. Selon vous, il existe un « affect du vrai », que vous nommez tout simplement « bonheur ». La notion de société pose d’abord un problème anthropologique : l’homme est-il naturellement sociable comme le soutient, par exemple, Aristote ? Je pense aussi qu’il faut comprendre le surgissement et le déploiement dans le temps des vérités, dont je persiste toutefois saisir, à travers leur être-là temporel, l’éternité intrinsèque. Pour commencer, jevoudrais dire en quoi cette question est pour nous d’actualité. Pourquoi livrer aux prêtres de tous bords le baptême et l’éducation métaphysique des enfants ? Ne pas abandonner ses principes ou son rôle par peur de quoi que ce soit, il ne faut être lâche. vous pouvez vous procurer ici ce numéro spécial, ainsi qu’en feuilleter un extrait gratuit, Alain Policar : “Le décolonialisme a renoncé au dialogue avec les oppresseurs”, Alain Badiou. Mais s’il y a une idéologie, de surcroît dominante, dans nos pays, disons dans tout l’Occident « démocratique », c’est bien le relativisme libéral, auquel ils se ralliaient avec enthousiasme ! D’abord, et sans doute je me distingue de Platon sur ce point, je ne dis jamais « la vérité », mais « une vérité » et « les vérités ». », « Dieu existe-t-il ? Donner implique un choix moral, or ce n’est pas ici le cas. On « descend » ainsi d’une multiplicité aux multiplicités qui la composent. « Mai 68 a été mon chemin de Damas », «La vie de Platon»: le blockbuster philosophique d’Alain Badiou, Alain Badiou. Vous savez, les communistes utopiques du XIXe siècle pensaient que Platon était l’un des leurs. Exactement. L’être humain est un être fondamentalement relationnel. Écrire x ∈ y, c’est dire que x est un élément de y. Mais x à son tour est un ensemble. La question est déjà philosophique, en tout cas elle peut l’être (aucune question n’est philosophique par elle-même : elle ne l’est qu’au sein d’une certaine problématique, qui lui donne son sens et sa portée), ce qui explique qu’il y ait autant de réponses différentes, ou peu s’en faut, que de philosophies différentes. D’où il découle qu’à l’extrême origine de la production de ce « quelque chose » doit se trouver ce que j’appelle un événement : une multiplicité qui « arrive » à la situation sans être régie par les lois de la situation en question. La philosophie n’est pas un savoir de plus mais une réflexion sur les savoirs disponibles, elle n'est pas une science au sens où son but n’est pas de connaître objectivement la réalité,…. Le film s’intitulerait : «La Vie de Platon…». – Wittgenstein V. Réflexivité et critique En philosophant, nous sommes souvent amenés à réaliser un retour de la pensée sur elle-même : Tout ceux qui vivent ne philosophent pas et ceux qui philosophent ne le font pas continuellement. Ajoutons que Platon est féministe, oui, oui ! Il convoque un esclave dans une scène fameuse du Ménon, mais pour quoi faire ? La philosophie est au service des vérités, sans en être une à proprement parler. Ce qui signifie que nous ne pouvons plus définir la nature comme nous l'avions fait, à savoir comme l'ensemble du réel ôté de ce que l'homme a produit : la nature englobe désormais tout le réel puisque aucune chose ne saurait ne soustraire aux lois de la nature, parce qu'en tant que … Le vrai cogito n'est pas cogito ergo sum mais sum moribundus.Je suis le destiné à mourir. La société désigne un ensemble d’individus reliés entre eux par une culture et une histoire. Pour comprendre la philosophie de Nietzsche,il faut d’abord cerner un petit peu le personnage. La société permet-elle à l’individu de s’accomplir ? Mon axiome ontologique relève d’une affirmation simple et difficilement contestable : ce qu’il y a de commun à tout ce dont nous faisons l’expérience que « ça est », c’est de se présenter comme multiplicité. Le bonheur relève à la fois de la psychologie et de la morale. L’ épicurisme a été fondé par Épicure en 306 avant J-C : c’est l’école du Jardin (du fait qu’elle a été fondée dans un jardin d’Athènes) ou la “philosophie du Jardin” qui repose sur l’ éthique du bonheur. La condition humaine en est une de fragilité et d’incomplétude. En philosophant soi-même : en s’interrogeant sur sa propre pensée, sur la pensée des autres, sur le monde, la société…. Nous laisse-t-elle dans le doute perpétuel et le scepticisme…. Ces questions philosophiques sont donc basées sur la connaissance, l' action (qui mène la morale) et l' anthropologie Son but est la liberté. La philosophie du yoga propose des commandements moraux, à appliquer au quotidien. "Qu'est-ce que bien vivre ?" Les questions du genre : l’Un et le Multiple, à quoi bon vivre ? qu’est-ce qui est un bien commun de moi et d’un autre ? La vérité a aussi un sens pratique : la véracité désigne le fait de dire la vérité qui, dans ce cas, s’oppose au mensonge. Cela implique la reconnaissance de son ignorance et ne pas prétendre le savoir que nous n'avons pas, mais d'accepter le fait que notre savoir n'est qu'un grain de sable dans un immense océan. Etayé par ce point d’origine, opère alors ce que je nomme un Sujet, qui construit, cette fois dans les lois de la situation, mais en tant que conséquence du « il arrive » de l’événement, une nouvelle multiplicité – une œuvre – qui a une valeur universelle, parce qu’elle n’est pas le produit déterminé de la situation où elle a été créée. Comment travailler efficacement ? Qu’est-ce que le bien-vivre selon Épicure ? Eh bien, tout cela évoque irrésistiblement ceux qu’on appelait à Athènes les « sophistes », qui sont les ennemis privilégiés de la philosophie au sens de Platon. Claude Birman. La raison de la direction n’est qu’une signification de la sensibilité « La philosophie est un certain mode d'appartenance qui rend capable de prendre en vue l'étant en tournant le regard vers ce qu'il est, en tant qu'il est étant » (p.331), ce qui est visé c'est l'« étantité» (Platon la détermine comme ἰδέα, Aristote comme energia ἐνέργεια ou principe et cause, soit enfin l'objectif et le disponible dans le monde moderne ). Méthode d'analyse d'un texte en philosophie Pourquoi ? Pourquoi ? Vous savez, on peut sans doute dire que la modernité, en philosophie, s’introduit avec la prise en compte minutieuse du temps. La philosophie, en ce sens, est la destitution de toute parole sacrée ou de toute valeur accordée aux pouvoirs existants. Peut-on vivre sans philosopher ? Ce qui valide les énoncés de quiconque prend la parole, ce sont les preuves qu’il est en état de fournir à l’appui de ses dires. restant à vivre. Toute idéologie politique, sociale ou religieuse est une vision du monde, une philosophie en marche. Vous aussi soulignez que vivre en contact avec une vérité, c’est la clef d’une vie digne d’être vécue, d’une « vraie vie », de la vie bonne, si l’on veut parler comme un Ancien…, Seule une vie placée sous le signe des Idées est, en effet, digne d’être vécue pour Platon. Vivre en philosophant c'est de ne pas suivre la norme que la majorité suivent, mais d'en faire une autre avec des principes. Il ne se réduit donc pas au plaisir qui est toujours bref et partiel. Alain Badiou lie l’expérience de la pensée à l’engagement dans la tradition sartrienne et revendique l’héritage de 1968. Mais qu’est-ce que la vérité et comment y accéder puisqu’on ne peut la confondre avec la réalité ? Le temps, en philosophie, est une des questions majeures. On reconnaît là le ressort de l’universalité d’une vérité : elle ne présente pas une particularité de la situation ; elle peut être reconnue comme vérité dans d’autres situations, voire dans toutes les situations possibles. On naît en famille, on meurt parfois au combat, mais c'est en société qu'on vit. Si vous affirmez, comme Platon, l’existence de vérités universelles, vous insistez aussi sur leur surgissement contingent à travers des événements…. Alain Badiou : Il y a une raison négative assez claire : comme à Athènes du temps de Platon, ce qui domine la scène intellectuelle est une conception « molle », descriptive, au jour le jour, des responsabilités de la pensée, pour ne rien dire de la philosophie. La philosophie est étymologiquement « l'amour de la sagesse ». … On ramène souvent faussement Platon à l’opposition du sensible et de l’intelligible. La philosophie s’est comprise très tôt comme une manière de vivre et non pas uniquement comme une réflexion théorique. Platon était particulièrement méfiant à l’égard du devenir. En effet, la vie renvoie à une perspective biologique : elle se rapporte à la croissance et la conservation d'un être selon des principes organiques. Précisément, les lois sont faites pour maintenir l’ordre public et favoriser le vivre-ensemble; c’est la raison pour laquelle elles limitent la liberté de chacun : je n’ai pas le droit d’insulter, de diffamer, de voler, d’importuner, du brutaliser, de m’approprier le bien d’autrui, de tuer, de polluer, etc. Pourtant, il semble qu’il existe de bonnes raisons de vouloir vivre sans État. Car elle est une discipline seconde. Parvenir à sa fin, cesser de vivre au terme du processus vital est aussi le propre de l'animal. Ce qui veut dire, en gros, que les éléments de cet ensemble ne sont pas rassemblés par une propriété commune, que donc l’ensemble, au regard des propriétés disponibles dans la situation, a quelque chose d’indescriptible. Une éternité qui, pour les sujets humains, est en quelque sorte rétroactive, du fait que la possibilité de la faire se déployer, d’en réaliser la présence, dépend de l’activité d’un ou de plusieurs sujets. Craindre la mort est admettre que l'on possède un savoir que l'on n'a pas. phrase de William Shakespeare : « Être ou ne pas être ? Ni verbiage ni recueil de recettes, la philosophie trouve sa voie dans l’articulation entre pensée et vie réelle. À titre personnel, prenez-vous plaisir aujourd’hui encore à pratiquer les mathématiques ? Vivre en philosophant n'est pas seulement reconnaitre son ignorance, mais aussi de partir à la recherche du juste, de principes et de laisser ces principes nous dirriger. Nous avons besoin de Platon comme de Descartes ou Hegel, en même temps que d’Archimède et de Galois, de Newton et d’Einstein, de Bach et de Schönberg, de Léonard de Vinci et de Braque, de Spartacus et de Robespierre, de Marx et de Mao, et de beaucoup d’autres, pour sortir du très vieux monde néolithique, le monde de la triade « propriété privée, famille, État », dans lequel nous pataugeons encore, pour ré-enchanter la vie ordinaire, retrouver le chemin du bonheur réel, faire que toutes les singularités humaines puissent égalitairement s’absolutiser dans la rencontre avec les vérités. Mon exemple le plus simple est la construction d’un amour, dans un monde donné, à partir de quelque chose qui arrive de façon aléatoire : en l’occurrence, la rencontre de deux sujets. La plupart des personnes se sont sûrement posé la question. Cependant, il reste vrai que pour Platon, il n’y a pas de genèse des vérités, il y en a seulement une intuition, une découverte. C’est bien pourquoi, comme Spinoza le répète, sans les mathématiques, l’homme serait resté ignorant, asservi aux légendes religieuses. On le dit assez naturellement, on en comprend l'idée facilement, même mon téléphone — alors que le terme est un néologisme — l'écrit spontanément. Elle tente d’installer la vie des individus dans la subjectivation des vérités, et elle soutient que là est la vraie, vie, qui se signale en effet par le bonheur. Socrate, lui ne faisait donc pas d'injustice d'ignorance, car il ne se basait pas sur c'est jugements. Nietzsche, c’est l’histoire d’un philosophe allemand née en 1844, qui n’a pas été épargné par le malheur. Le bonheur est un état de satisfaction durable et complet. D’où l’urgence de revenir à Platon, pour reprendre la première question ? Pour démontrer que cet esclave peut participer, comme tout homme, à la vérité d’une subtile démonstration mathématique ! Comment ? Vivre sous l’emblème de quelques vérités – ce qui n’est ni simple, ni toujours durable –, c’est participer de l’universel. À quoi sert la philosophie ? Il redeviendra alors ce qu’il a été déjà parfois : un des premiers maîtres du communisme philosophique. C’est la question que pose le célèbre philosophe, auteur de “L’Être et l’Événement”. C’est vrai pour les mathématiques, nées sous la forme que nous leur connaissons dans la Grèce antique, mais c’est aussi vrai pour la physique de Newton, la relativité générale d’Einstein, le théâtre de Shakespeare, la peinture de Picasso, l’analyse politique des sociétés de Marx, la Révolution culturelle en Chine, l’amour de Dante pour Béatrice, tout ce qui exemplifie une valeur universelle. Il faut suivre son rôle, chercher les principes vrais et agir avec, Politique de confidentialité - Californie (USA). : “L’humanité est capable de justice”. On lui reprochait d’enseigner des idées subversives… Le philosophe exprime ici l’idée que ce qui donne du sens à la vie d’un être humain, c’est d’agir pour défendre ce qu’il croit bon, jusqu’à en mourir s’il l’estime nécessaire. D’ailleurs plusieurs œuvres…. Dès lors philosopher ne peut être considéré comme une condition nécessaire de notre vie. Je crois d’ailleurs que s’il n’existe nulle vérité universelle, ce n’est pas la peine de parler de philosophie, le mot « idéologie » suffit. Vivre sous l’emblème de quelques vérités, c’est participer de l’universel”. Qu’est-ce qui rend Platon si actuel à vos yeux, 2 500 ans après sa mort ? Vivre c’est la foi, l’assurance de la résurection et de la vie éternelle; il n’y a pas de vie possible sans cela. Or la théorie des ensembles, telle que l’a inventée Cantor, et qui depuis a fait des progrès prodigieux, est justement une théorie formelle de la multiplicité comme telle. Platon insiste de manière récurrente sur l’importance de vivre sous le signe des Idées. Tout ensemble est défini à partir d’une relation fondamentale, l’appartenance. le monde est-il infini ? Et la philosophie est la méta-physique de cette physique, l’enseignement de sa possibilité. La philosophie commande donc la destinée historique de l'humanité autant que la vie individuelle. Comme le dit Lacan : « L’être (d’un sujet), c’est l’amour qui vient à y aborder dans la rencontre ». Le Platon dont nous avons le plus urgent besoin devra en effet abandonner son aristocratisme, du reste paradoxal au regard de tout le reste de sa doctrine. C’est pourquoi on ne peut apprendre la philosophie, disait Kant : on ne peut qu’apprendre à philosopher. Alors que dans l’Antiquité, Platon accorde au temps une place de second plan et lui concède, tout au plus, d’être une représentation inférieure de l’éternité, Kant, au XVIIIe siècle, grandit le rôle du temps, dans lequel il voit une forme universelle permettant de saisir les phénomènes. Toute apparence d’Un se défait en multiplicité, et en multiplicité de multiplicités. Rousseau matérialise ici le tyran en tant que brigand et la peur par le pistolet. Une personne qui n'a pas peur de la mort ne peu être corrompu et peut donc atteindre ses buts plus facilement. À vrai dire, une philosophie aristocratique, ou libérale au sens du capitalisme moderne, cela ne veut, je crois, rien dire du tout. D’autant qu’être heureux peut dépendre de la bonne fortune (sens premier du mot « bonheur ») et pas seulement du mérite de celui qui cherche la félicité. Toutefois cette force ne donne aucun droit légitime. Dès lors, si elle n’est pas révélée comme dans la religion, elle doit être démontrée. Pourquoi ? qu’ils ne pensent pas philosophiquement leur individualité et le monde, ce qui montrerait que la question qui nous intéresse ici n’est pas celle du soi biologique mais celle du moi philosophant. Vivre en philosophant c'est de ne pas suivre la norme que la majorité suivent, mais d'en faire une autre avec des principes. C’est, me dira-t-on, une question à la fois exorbitante etusée : comment peut-on avoir la prétention d’apporter une réponse à unequestion qui est aussi ancienne que les plus anciennes philosophies, les plusanciennes sagesses ? Il ne s’agit donc pas simplement de vivre, mai… Mais qu'est-ce que vivre ? Une conception journalistique – pardonnez-moi cette comparaison ! L’exemple que donne Rousseau vise à renverser ce qu’il réfute : « obéissez aux puissances », dans le sens de « forces ». – passionnent universellement les enfants. On appelle eudémonisme la doctrine qui considère que la quête du bonheur est le but des actions humaines et hédonisme celle qui vise le simple plaisir. Pour lui, comme pour le père de la philosophie, la seule vie digne d’être vécue est la vie placée sous le signe d’une vérité. Ensemble des événements et des activités qui constituent le cadre et le contenu d’une existence, sur le plan individuel ou collectif. lectures, sans outils. « Qu’est-ceque vivre ? Autrement dit : l’amour est l’expérience universelle d’une approche de l’être d’un autre. « Contre sa lettre », pas exactement ! Qu’est-ce que la philosophie ? Qu’est-ce que la philosophie ? Je pense que Platon est dans les préjugés du temps quant il définit comme rare le « naturel philosophe », ce qui l’amène finalement à une sorte d’eugénisme pénible.